La domiciliation sera désormais reconnue comme une activité commerciale en tant que telle. La réforme qui trébuchait sur la responsabilité fiscale, voit son projet de loi finalement entrer dans le circuit d’adoption.
La réglementation de la domiciliation entre dans le cadre d’une amélioration de l’environnement des affaires et d’une stratégie du gouvernement qui est censée favoriser la création d’entreprises
Après de multiples tentatives, une vision pour la réglementation de la domiciliation d’entreprise a été trouvée par le gouvernement a enfin . C’est au cours du conseil de gouvernement du jeudi 15 février qu’a été adopté le projet de loi 89-17 relatif à la révision du livre IV du code de commerce. «L’un des principaux apports de la réforme consiste en la reconnaissance de la domiciliation comme étant une activité commerciale», confie Anas Chorfi, président de l’Association marocaine des centres d’affaires (AMCA).
La réforme crée un cadre réglementaire pour la domiciliation d’entreprise qui était régie depuis 2003 par une simple recommandation du ministère de la Justice. Une circulaire qui fixait la durée de séjour d’une entreprise dans un centre de domiciliation à trois mois, renouvelable une fois. Mais dans la pratique, certaines structures exercent leurs activités via un centre d’affaires depuis plus de dix ans. Une solution idéale pour des entreprises n’ayant pas besoin d’un local, par exemple.
Outre la reconnaissance officielle de l’activité, le gouvernement a enfin trouvé la solution pour régler le problème de la solidarité fiscale. Celle-ci avait constitué pendant plusieurs années la pierre d’achoppement de la réforme. «Le contenu des articles relatifs à la responsabilité fiscale nous convient parfaitement et constitue une grande avancée par rapport aux versions précédentes», souligne Chorfi.
Le projet de texte prévoit cinq dispositions dont le respect est obligatoire sous peine d’être fiscalement solidaire avec une entreprise domiciliée défaillante. Ainsi, chaque centre de domiciliation doit détenir tous les éléments d’identification des entreprises personnes morales ou physiques: noms, adresse, numéro de téléphone, CIN…
Le dossier doit également comporter des informations sur l’ensemble des locaux où elles exercent ainsi que les sites de conservation de leurs documents comptables. Ce qui ne sera pas une tâche aisée du fait qu’il sera difficile d’identifier les différentes sociétés dans laquelle une entreprise est impliquée.
Le domiciliataire doit également s’assurer que l’entreprise domiciliée s’inscrive le cas échéant au registre de commerce dans un délai de trois mois après la signature du contrat de domiciliation. Autre obligation pour éviter la solidarité fiscale: le centre de domiciliation doit transmettre à l’administration fiscale et des douanes pour les opérateurs du commerce extérieur la liste des entreprises domiciliées avant le 31 janvier de chaque année.
Lorsque le responsable d’une structure domiciliée ne récupère pas un courrier recommandé concernant les impôts, le centre doit aviser l’administration fiscale dans un délai d’un mois. Il doit également informer les services des Impôts, de la douane et le bureau d’ordre des tribunaux concernés de la fin des contrats de domiciliation ou leur rupture prématuré. Il suffit que l’une de ces obligations ne soit pas remplie pour que la responsabilité fiscale du domiciliataire soit engagée.
Le texte prévoit aussi l’obligation de conserver les documents des entreprises comptables. Ce qui sera difficile car cela nécessite des locaux appropriés. A moins que les documents ne soient dématérialisés. A l’issue d’une séance de travail avec son avocat, l’Association des centres d’affaires s’est rendu compte que le projet de texte comporte quelques incohérences.
Par exemple, l’interdiction de domicilier une entreprise qui dispose déjà d’un siège social. Une mesure qui paraît contradictoire avec une autre disposition: l’autorisation des filiales ou d’agences à emménager dans un centre de coworking où exercent plusieurs entités. A l’évidence, ces incohérences pourraient être levées une fois que le texte sera examiné au Parlement.
Contrairement à la circulaire diffusée en 2003 par le ministère de la Justice, le projet de loi dans le circuit d’adoption limite la durée de la domiciliation d’entreprise uniquement pour certaines activités qui seront définies par voie réglementaire. Sont concernées les activités qui doivent obligatoirement disposer de leur propre siège à terme, telles que l’assurance, la banque… En revanche, certaines activités de services, pouvant être exercées soit à domicile, soit chez le client, pourront être indéfiniment domiciliées.
L’activité de la domiciliation sera soumise à une simple déclaration auprès des autorités compétentes. Cette démarche est préalable à l’inscription au registre de commerce. Un texte devra en définir les modalités. Les amendes en cas de non-respect des dispositions réglementaires sont prévues et varient entre 5.000 et 20.000 DH.
La domiciliation demeure une bonne alternative pour les entreprises au début de leur activité. Selon les estimations de l’AMCA, environ 72% des entreprises qui se créent à Casablanca y recourent dans leur phase de démarrage. Les entreprises domiciliées sont généralement des TPE et des PME. En moyenne, la durée de séjour varie entre 4 et 5 ans. Pour certains, cette option est définitive. La majeur partie des grandes entreprises ne dépasse pas six mois avant de disposer de leur propre local. 20 à 25% des entreprises domiciliées sont créées par des étrangers.
Il existerait 96 centres d’affaires, dont 56 ont adhéré à l’Association marocaine des centres d’affaires (AMCA). Certains opérateurs disposent de plusieurs centres, domiciliant plusieurs milliers d’entreprises. La métropole économique en concentre la majorité. Les autres sont surtout concentrés à Tanger, Marrakech, Rabat et dans une moindre mesure Agadir, Fès…